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Série de 10 fiches introductives pour comprendre l'Accord sur l'Agriculture (AsA) de l'OMC.

5. Pourquoi les prix mondiaux des produits agroalimentaires n'ont aucun sens économique

Par Jacques Berthelot (berthelot@ensat.fr, http://solidarite.asso.fr/actions/Agriculture.htm)
Novembre 2004.

Pour au moins 11 raisons :

1) Le prix "mondial" ne concerne qu'une part minime de la production mondiale des produits agroalimentaires de base : sur les 7 années 1995-2001, cette part a été de 10,8% pour les céréales, 6,9% pour les viandes et 6,5% pour les produits laitiers. De même la part de la production de l'UE exportée sur le marché mondial n'a été que de 11,1% pour les céréales, 7,7% pour les viandes et 9,6% pour les produits laitiers.

2) Le prix mondial des produits agroalimentaires n'existe pas : le prix mondial n'est qu'un prix international, parfois celui du pays le plus "compétitif", le plus souvent celui du principal pays exportateur où sont cotés à terme les produits. Considérer comme prix mondiaux des produits laitiers ceux de Nouvelle Zélande est absurde car elle ne produit que 2,2% du lait mondial, est "preneur de prix" (prix fixés au dessous de ceux de l'UE, 1er exportateur mais à des prix de dumping) et, si elle a 20% du marché mondial, elle ne peut guère accroître cette part car elle exporte déjà 90% de sa production, sinon par une intensification qui renchérira ses prix et accroîtra la pollution. Absurdité aussi de prendre les prix des céréales et oléagineux des USA comme prix mondiaux car, du fait des aides directes, ils sont inférieurs de 30 à 50% aux coûts de production.

3) Les prix agroalimentaires mondiaux sont très volatils et en forte baisse à long terme et les interventions sur les marchés à terme ne peuvent y remédier : selon l'USDA, seuls 7% des farmers des USA ont utilisé les marchés à terme en 1996 et ces contrats à terme "ont une aptitude  limitée à relever le revenu". Surtout, les marchés à terme sont incompatibles avec toute régulation des prix car les spéculateurs n'interviennent que s'il y a une forte volatilité des prix.

4) Les projections de hausse des prix agroalimentaires mondiaux à moyen et long termes sont constamment démenties par les faits : mais elles jouent un rôle politique évident pour faire baisser les prix en faisant anticiper aux producteurs des hausses pour les inciter à accroître leur production. 

5) Les produits agroalimentaires de base occidentaux sont exportés à des prix de dumping, qui sont en fait minimisés car ils intègrent un ensemble imprécis d'aides publiques difficiles à limiter en amont. 

6) Les prix agroalimentaires sont manipulés par des quasi-monopoles de plus en plus concentrés.  

7) Ils sont aussi manipulés par les monopoles d'Etat et même par l'UE et les USA qui différencient fortement leurs restitutions ou garanties de crédit à l'exportation selon les pays destinataires.

8) Ils seraient les vrais prix car ils maximiseraient le bien-être économique : en fait le surplus des consommateurs est inexistant car la baisse des prix agricoles ne leur est pas répercutée.

9) Ils seraient les vrais prix car reflètant les avantages comparatifs (AC) des pays : quel AC pour un paysan malien (1 tonne de mil par an) face à son collègue français (1000 tonnes de blé) qui reçoit en outre près de 60 000 € d'aides directes? 

10) Ils seraient les vrais prix parce que libellés en devises, notamment en dollars! 

11) Ils n'interdisent pas les défaillances du marché en matière sociale, d'environnement et de sécurité sanitaire des aliments.

 

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