a b c B u r k i n a

Pour une préparation efficace des pays ACP 
aux négociations commerciales agricoles

(1° partie)

Le CTA (Centre Technique Agricole Européen) , en collaboration avec Solagral, a lancé un forum sur les négociations commerciales agricoles entre l' Union Européenne et les Pays ACP. La synthèse de la première partie nous a semblé suffisaemment intéressante pour l'accueillir sur notre site.

Première partie

Les principaux obstacles rencontrés par les exportations agricoles des pays ACP sur les marchés internationaux

La première partie du forum de discussion était consacrée à l'identification des intérêts que doivent défendre les pays ACP dans les négociations agricoles internationales, et notamment les difficultés rencontrées par leurs exportations agricoles sur les marchés mondiaux.

Constat

La mise en œuvre des accords de Lomé, avec la baisse des droits de douane et les contingents offerts, ainsi que la libéralisation des échanges dans le cadre des Accords de Marrakech n'ont pas permis aux pays ACP de développer leurs échanges, notamment vers l'Union européenne, malgré quelques exemples de réussite (fleurs, bois, poissons). Au contraire, ces derniers ont vu leur part dans les importations de l'UE régresser de 7% en 1976 à 4% en 2000.

Obstacles rencontrés sur les marchés mondiaux

Plusieurs obstacles aux exportations agricoles des pays ACP ont été identifiés :

Les barrières tarifaires sont toujours importantes, notamment pour les produits agricoles transformés (progressivité des droits de douane). Cette structure des droits de douane dans les pays du Nord confine les pays ACP dans la production et l'exportation de produits primaires, dont les cours sont toujours en baisse.

Cependant, avec la baisse des droits de douane en cours à l'OMC et surtout la négociation des accords de partenariat économique (APE) et la mise en œuvre de l'initiative "tout sauf les armes" de l'UE, le problème des barrières tarifaires tend à devenir moins important. Seules quelques préoccupations persistent en ce qui concerne la négociation des APE et le sort qui sera réservé aux pays ACP non PMA qui ne seront pas en mesure de signer des APE. Ils devront chercher à conserver l'accès privilégié au marché européen dont ils bénéficient actuellement, afin que leur situation de ne dégrade pas. De même, les pays ACP devront porter une attention particulière à l'évolution des protocoles (sucre, banane, viande).

Mais les barrières tarifaires sont de plus en plus remplacées par des barrières non-tarifaires. Les normes sanitaires, phytosanitaires, et techniques en particulier constituent des obstacles de plus en plus importants aux échanges des pays ACP. Plusieurs problèmes ont été soulignés : les normes sont dans leur grande majorité définies par les pays du Nord et ne prennent pas en compte les spécificités des pays ACP; ces derniers n'ont pas les capacités techniques et administratives pour défendre ces spécificités dans les organismes internationaux de définition des normes et pour mettre en œuvre ces normes (complexité des normes, manque de contrôle…). Par ailleurs, la sincérité des normes appliquées dans les pays du Nord est régulièrement mise en doute.

Ont également été mentionnées parmi les barrières non-tarifaires la fixation de conditions non commerciales pour les préférences, des règles trop strictes pour attester l'origine des produits, la complexité des documents et des procédures douanières.

Il est donc très important pour les pays ACP de disposer d'une assistance technique appropriée, notamment en matière de normes (au niveau technique mais aussi institutionnel pour atteindre les normes et contrôler leur bonne application, mais aussi pour former des experts capables de défendre les intérêts des ACP dans les négociations internationales).

Parmi les obstacles les plus important cités par les participants, le caractère fortement inégalitaire des échanges agricoles internationaux a été systématiquement rappelé. Il s'agit surtout de la concurrence déloyale exercée par les exportations de produits agricoles fortement soutenus en provenance des pays développés qui décourage les producteurs ACP. En Afrique, les principaux produits touchés par cette concurrence sont le café, le cacao, le coton, les produits avicoles, le riz. Il a été rappelé que tous les soutiens, qu'ils soient directement liés au volume de production ou découplés, ont toujours des effets sur la compétitivité des produits agricoles des pays du Nord, et donc des effets de concurrence déloyale sur les exportations des pays ACP.

Enfin, l'instabilité des relations économiques internationales, et surtout l'imprévisibilité des cours des matières premières constituent un obstacle non négligeable au développement des exportations agricoles des pays ACP dont les économies sont particulièrement vulnérables.

Au-delà des problèmes liés à la concurrence déloyale des exportations agricole des pays du Nord, il existe un réel problème de compétitivité interne des produits agricoles ACP lié aux contraintes de production : manque d'infrastructure, faiblesse des services financiers, insuffisance des structures de production et de commercialisation qui sont essentiellement axées sur l'exportation de matières premières, au lieu de favoriser la transformation. Cette situation s'explique par l'absence de politiques agricoles dans les pays ACP liée notamment à la mise en œuvre des programmes d'ajustement structurels. Il en résulte une très faible diversification des exportations agricoles.

L'accès réel au marché des pays développés est aussi fortement conditionné par le fonctionnement des structures de commercialisation. Il a en particulier été souligné que les grandes centrales d'achat des pays développés jouent un rôle majeur dans la qualification des produits importables. Le problème rencontré ici n'est pas celui de la capacité des Etats à défendre leur accès aux marchés des pays du Nord, mais plutôt de la capacité des producteurs à s'organiser face à ces opérateurs commerciaux privés. La responsabilité des Etats est alors d'appuyer les organisations professionnelles agricoles et les exportateurs dans leurs activités de négociation avec les opérateurs commerciaux privés dans les pays développés.

D'autres intérêts à défendre dans les négociations agricoles internationales

Mais le plus important pour les pays ACP, qui sont dans leur grande majorité en situation de déficit des échanges agricoles, n'est pas de défendre l'accès aux marchés des pays du Nord, mais plutôt de défendre l'accès à leur propre marché intérieur, en se protégeant contre les importations à bas prix en provenance des pays développés qui menace le développement de leur agriculture.

En effet, la différence de compétitivité entre les pays ACP et les pays du Nord est telle, et les niveaux de soutien à l'agriculture, en Europe notamment, sont tellement élevés qu'il est impossible de mettre en concurrence directe ces deux types d'agriculture. Par conséquent, l'amélioration de l'accès aux marchés du Nord ne sera qu'une réponse très partielle aux problèmes rencontrés par les agricultures des pays ACP. Surtout, la mise en place de relations réciproques dans le cadre des Accords de partenariat économique risque de ruiner les possibilités de développement des économies ACP. De plus, la question de l'accès au marché européen est d'autant moins importante que la réforme en cours de la politique agricole commune conduit à réduire les prix intérieurs sur le marché européen, et donc à réduire l'attractivité de ce marché pour les pays ACP. Enfin, dans certains secteurs, la négociation d'un accès supplémentaire aux marchés du Nord n'est pas une question prioritaire en raison de la saturation de ces marchés (c'est par exemple le cas de l'arachide sénégalaise qui traverse une crise structurelle en raison de la saturation du marché européen en huiles et de la concurrence des autres produit oléagineux).

La protection des marchés intérieurs ACP, et notamment des agricultures paysannes, est un préalable au développement des agricultures. Certaines filières en Afrique n'ont aucune chance de se développer sans cette protection (riz, sucre, élevage). La protection est aussi un moyen d'augmenter la valeur ajoutée des produits exportés (produits plus élaborés) et de diversifier les productions.

Il est donc dans l'intérêt de pays ACP de pouvoir renégocier leurs tarifs douaniers, soit pour répondre à des situations de dumping sur leurs marchés intérieurs, soit pour harmoniser leurs politiques douanières au sein de zones d'intégration régionales.

En effet, l'intégration régionale et le développement des échanges régionaux, jusqu'ici quasi inexistant, constituent une des réponses, sinon la réponse la plus appropriée aux problèmes rencontrés par les pays ACP dans les échanges agricoles mondiaux. Cette intégration nécessite évidemment la définition de stratégies et de positions communes dans les négociations internationales. Ce thème sera abordé en détail dans la deuxième partie du forum.

2 ° partie                          3 ° partie  (à paraître)                   4 ° partie (à paraître)

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