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Dette des pays pauvres

Naissance d’une coalition pour son annulation au Faso

A Addis Abebas, Thomas SANKARA alors Président du Faso, réclamait l’annulation de la dette devant l’Organisation de l’unité africaine. Il disait : "Si nous payons la dette nous mourons. Si nous ne payons pas, eux (NDLR les créanciers) ne mouront pas". Bien de gens même n’étant pas d’accord avec l’idée l’ont appréciée comme première proposition venant d’un jeune révolutionnaire au sang bouillant, en fait une idée venant d’un homme un peu fou. Aujourd’hui l’annulation de la dette plus que d’actualité est une nécessité. Elle est l’alternative pour le redécollage économique et le développement des pays en voie de développement. Et cela, la société civile l’a compris (ONG). La preuve, un groupe d’organisations non-gouvernementales nationales a pris sur lui l’initiative de susciter une alliance conjoncturelle des organisations de la société civile dénommée coalition nation pour l’annulation de la dette et pour un autre développement au Burkina Faso. Cette coalition dont le président est Monsieur Norbert ZONGO a donné mercredi 10 avril dernier une conférence de presse à Ouagadougou pour dénoncer la dette des pays pauvres.

Témoignage de Bagnini KOHOUN

"Tous les observateurs avertis des relations économiques internationales sont unanimes à reconnaître que la dette est illégitime, injuste, frauduleuse, immorale et secrète la pauvreté puisqu’elle prive les Etats des moyens de promouvoir de meilleures conditions de vie pour les populations. Il apparaît alors très urgent de changer le cours de choses".

C’est par ces termes que Monsieur Norbert ZONGO a introduit sa conférence de presse. Selon un des conférenciers en l’occurrence Madame Clémentine OUEDRAOGO de Promo-femmes, le constat est évident. Le Burkina Faso est aujourd’hui classé 159ème sur les 162 pays selon l’indice du développement humain durable calculé par le PNUD en 2001. Le Burkina ne devance que seulement les pays en guerre. Et pourtant relève Madame OUEDRAOGGO, ce n’était pas ainsi, nous n’occupions pas ce rang-ci avant l’entrée dans le PAS du pays en 1991. Depuis que notre pays est entré dans ce cercle infernal d’endettement public, plus rien ne va. La pauvreté se conjugue au pluriel. Tous les jours par voie de médias, on apprend que des prêts sont contractés. C’est de l’argent qui entre dans ce pays. Mais hélas rien ne va. La question se pose alors d’elle-même ; qu’est-ce qui ne va pas ? Selon les conférenciers, ce qui ne va pas au Faso, c’est l’utilisation que font nos dirigeants de l’argent emprunté. Cet argent ne bénéficie pas aux plus démunis qui payent pourtant un lourd tribut à ce système d’endettement auquel ils ne comprennent rien. La pauvre ménagère qui allume sa lampe au plus profond de Falagountou contribue au remboursement de la dette. Nos dirigeants nous endettent sans que nous puissions y comprendre quelque chose. Ils endettent même nos arrières petits-fils qui sont déjà innocemment des débiteurs. Selon des estimations en l’an 2000, chaque enfant Burkinabé en naissant est déjà endetté de 72.293 F CFA. Tout cela est injuste et il faut ouvrir l’œil et le bon. C’est ce que tente de faire la coalition nationale pour l’annulation de la dette et pour un autre développement, une coalition ouverte à tous.

L’annulation de la dette et après

Ce que défendent Norbert  ZONGO et ses camarades, ce n’est pas seulement l’annulation complète de la dette des pays pauvres. Certes, il faut d’abord l’annulation de la dette et les organisations de la société doivent lutter pour cela aux côtés des dirigeants qui d’ailleurs sont mal placés pour revendiquer l’annulation d’une dette qu’ils ont eux-mêmes contractée. Mais pour les besoins de la cause, la société civile et les responsables gouvernementaux doivent lutter main dans la main pour en finir avec la dette. Mais après… il faut qu’ils se disent la vérité. Plus jamais ça, voilà ce qui doit être le nouveau slogan, plus jamais les dirigeants ne doivent être les seuls à établir les projets pour les populations sans une implication réelle de la société civile qui doit désormais avoir un regard critique sur tout ce qui se passe dans le pays. Cela, il le faut, car même si on demande l’annulation de la dette aujourd’hui tout le monde reconnaît que cela ne mettra pas fin à la contraction de crédits pour le développement du Tiers-Monde dans le futur. Alors, il faut que la gestion soit rigoureuse. C’est cela l’alternative du développement que propose la coalition.

Et il ne faut pas s’y méprendre la coalition contre la dette n’est pas en fait une trouvaille des seuls Burkinabé. Des organisations du genre existent de par le monde et oeuvrent efficacement à l’annulation de la dette des pays du Tiers-Monde. La coalition du Burkina est naissante. Elle a besoin de tous pour grandir. Elle a surtout besoin de tous pour se donner du poids face aux dirigeants sur la gestion publique sur laquelle, elle veut désormais avoir un droit de regard. Il faut le dire la force de la coalition ne viendra pas seulement de l’intérieur, mais aussi de l’extérieur où il existe déjà des organisations similaires bien structurées et qui se font déjà entendre sur le plan international.


Article publié par L’Express du Faso, le vendredi 12 avril 2002.

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