Quelques bonnes raisons pour retarder la signature d'un APE entre l'Union Européenne et l'Afrique de l'Ouest

(2° partie)

4) On est encore loin de la libre circulation des personnes et des biens.

Plus grave, les échanges intracommunautaires n'augmentent pas comme les échanges avec le reste du monde. Les routes sont orientées Nord-Sud (du Sahel vers les ports) plus que Est-Ouest. L'Etat du réseau routier régional fait que, depuis Ouagadougou, il est plus facile de se rendre à Abidjan qu'à Lagos. Pourtant Lagos n'est pas plus éloignée de Ouagadougou que ne l'est Abidjan. 

La libre circulation des personnes et des biens, objectif annoncé de la CEDEAO, est loin d’être réalisée. Elle est entravée par des « taxations informelles ».

En 2005, un poids lourd doté d’une remorque doit payer 293 € de péage autoroutier entre Bruxelles et Barcelone (1 369 km), soit 22 € pour 100 km. En 2000, un poids lourd faisant la route Bamako – Dakar (1 245 km) devait payer en moyenne de 17 à 20 € pour 100 km «de péage sauvage». A la fin des années 90, il en coûtait 22 € pour 100 km entre Lagos et  Maiduguri (ville frontalière du Cameroun située au Nord du Nigeria). On paye donc pratiquement aussi cher pour rouler sur une autoroute européenne à 4 voies ou plus, que sur une route ouest-africaine à deux voies traversant villages et villes.

 

Fréquences des postes de contrôle sur quelques axes routiers (an 2000)

Parcours Distance en km Nombre de contrôles Fréquence en km
Lagos - Abidjan 992 69 14
Niamey - Ouagadougou 337 20 17
Lomé - Ouagadougou 989 34 29
Cotonou - Niamey 1036 34 30
Abidjan - Ouagadougou 1122 37 30
Accra - Ouagadougou 972 15 65
Source : CEDEAO

5) L'évolution rapide du commerce international de la CEDEAO demande un surcroît de réflexion.

En 1970, l'espace CEDEAO exportait 68 % de ses biens vers l'Europe. Aujourd'hui (2003 !), ce pourcentage n'est plus que de 37 %. Par contre, les exportations vers l'Asie sont passées de 2 à 11 %. Et cette évolution semble s'accélérer.

De même, les importations de l'espace CEDEAO de produits européens sont passées de 62 % à 43 %, tandis que celles en provenance de l'Asie sont passées de 7 à 25 %.

L'Europe a peur de se faire doubler par la Chine et autres pays d'Asie. C'est pour cela qu'elle est si pressée de signer cet accord (APE). Mais la CEDEAO ne ferait-elle pas bien de se demander si elle a intérêt à se livrer ainsi, pieds et mains liés, à la "gentille Europe" ?

Maurice Oudet, le 7 juin 2006

A suivre 

1ère partie

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