Confédération Paysanne du Faso (CPF)

Contribution de Monsieur TRAORE François à la réflexion sur le thème :

Organisations Paysannes et Problématique de l’accès aux marchés sous régionaux.(07 Mars 2005).

I – Eléments de contexte

Les années 1990 marquent l’engagement de l’ensemble des pays de la sous région dans des politiques d’ajustement structurel à travers la libéralisation et l’ouverture totale vers une économie de marché.

Le désengagement des Etats des principaux secteurs tels que la production, l’approvisionnement en intrants, la transformation et de la commercialisation des produits agricoles a posé avec acuité la question de la capacité professionnelle des Organisations Paysannes.

Face à cette situation, les Etats ont adopté des mesures importantes de politiques agricoles et de programmes d’émergence et de professionnalisation des producteurs agricoles souvent en concertation avec les acteurs.

En effet, la zone CEDEAO UEMOA représente plus de 200 millions de consommateurs potentiels et selon certains statistiques, le secteur agricole de l’UEMOA contribue pour 30% de la formation du PIB et assure plus de la moitié des exportations totales avec 75% de sa population active. Ces données économiques constituent des conditions favorables au développement des échanges commerciaux agricoles pour l’ensemble des pays de cette zone et fait de cette zone une région très convoitée au plan commercial.

II – Les Organisations Paysannes et la problématique de l’accès aux marchés

La mondialisation de l’économie transforme de fait l’agriculture des pays de la zone de la sous - région en un simple secteur. Les Organisations Paysannes et de producteurs agricoles sont convaincus que l’accès aux marchés sous régionaux de leurs produits agricoles est une opportunité pour privilégier la consommation intérieure de nos produits répondant ainsi à nos valeurs socioculturelles.

En effet, conscient de la nécessité de bénéficier pleinement des complémentarités des marchés de la sous région tels que le Nigeria, le Ghana et la Côte D’Ivoire, les Organisations Paysannes ne peuvent que concevoir l’accès aux marchés comme une nécessité. La circulation des produits agricoles sans inutiles entraves contribuera, de ce fait, pleinement au développement des échanges agricoles.

Pour nous leaders paysans, l’accès aux marchés nationaux ou internationaux ou plus précisément l’accès aux revenus est une condition incontournable à nos exploitations agricoles et familiales pour permettre aux producteurs de vivre du fruit du travail de la terre, de l’élevage, de la transformation des produits agricoles. Cet accès aux marchés est également la condition sine qua non de l’insertion de l’agriculture de la sous région dans l’économie de marché.

III – Les obstacles à l’accès aux marchés sous régionaux.

En dépit de la volonté politique affichée, de l’adoption des politiques agricoles harmonisées dans l’ensemble des pays de la sous – région, ainsi que la ratification de nombreux traités commerciaux, les Organisations Paysannes demeurent confrontées à certaines contraintes qui limitent considérablement leur accès aux différents marchés sous régionaux notamment :

la faible capacité professionnelle des Organisation Paysannes liée à leur faible niveau d’organisation et de structuration notamment en filière agricole ne leur permettant pas de maîtriser les informations sur les marchés intérieurs et extérieurs, les règles d’accès à certains marchés extérieurs, la contractualisation de partenariat crédible (commerçants, transporteurs, transformateurs …), les facilités d’accès aux crédits ;

la faible contribution des Organisations de producteurs dans l’animation des politiques agricoles nationales et régionales conséquemment à leurs faibles capacités de négociation avec les politiques et les partenaires;

l’imprécision de l’appui de certains partenaires techniques et financiers ayant comme résultat des injections financières considérables aux impacts souvent non visibles ou peu prioritaires.

De tels obstacles ne peuvent être surmontés qu’à travers une politique de professionnalisation des principaux acteurs et une convergence des appuis guidés exclusivement vers l’organisation des producteurs en filière, à travers des organisations et structures d’intérêts économiques et professionnels permettant d’accéder à ces marchés vitaux pour le meilleur fonctionnement de l’économie de nos exploitations. Cela demeure une exigence encore rendue plus importante par l’annonce de certains accords dont les Accords de Partenariat Economiques ( APE) en cours de signature par nos pays avec l’Union Européenne.

IV – Les initiatives

Malgré toutes ces difficultés évoquées, des exemples de réussite existent en matière d’organisation de producteurs en filière ayant déjà accès aux marchés sous régionaux. Il s’agit de :

la Fédération des Paysans du Fouta Djalon en Guinée Conakry qui développe des activités maraîchères fortement encrées dans l’économie et dans un excellent partenariat contractuel avec des transporteurs, des commerçants, des structures financières et l’appui des autorités politiques et administratives. Cette Fédération intervient sur le marché des pays voisins comme le Sénégal et la Gambie.

l’UGCPA de la Boucle du Mouhoun au Burkina Faso qui dispose d’une expérience confirmée dans le domaine de la collecte et de la commercialisation des céréales ;

Faso DJIGUI dans la région de Ségou au Mali structuré autour des filières céréales et riz et dont le niveau d’organisation est en train de s’illustrer et de s’imposer comme une force de proposition et d’insertion aux marchés dans un contexte d’envahissement de nos marchés par le riz importé notamment d’Asie.

 

V – Des atouts réels pour une organisation des producteurs en filières agricoles.

Au vu des expériences qui existent actuellement au niveau des différents pays, l’organisation des producteurs en filières agricoles a contribué à une avancée positive des organisations paysannes dans le sens de la maîtrise de leurs activités. Des ces nombreux atouts, on citera :

la contribution à une véritable professionnalisation des producteurs et des autres acteurs d’une même filière,

une meilleure organisation de la commercialisation des produits agricoles avec surtout une bonne maîtrise des circuits de commercialisation et des négociations sur les prix des produits au vu de la qualité exigée,

une organisation de l’approvisionnement en intrants agricoles avec la garantie d’une meilleure qualité, d’un prix négocié etc.,

la facilitation de la mise en place d’un crédit agricole répondant au besoin des membres et plus sécurisant pour les instituts de financements.

- la consolidation des organisations paysannes en tant qu’interlocuteurs crédibles défendant les intérêts de leurs membres et se positionnant comme des structures viables ayant un minimum d’autonomie.

VI - Conclusion

La réflexion que je me suis proposé de mener se veut non seulement comme une contribution des organisations paysannes et leurs leaders mais aussi une évaluation des principaux enjeux et stratégies relatifs à l’accès régional aux marchés des produits agricoles.

Dans un contexte guidé et voulu pour rendre le producteur ‘‘gagnant’’, le développement économique et social pour être le résultat de la compétitivité et la durabilité dans ce processus, doivent mobiliser autour du producteur professionnel et son organisation en filière les moyens d’accès aux marchés. La dynamique du partenariat OP/Bailleurs doit s’inscrire dans cet élan avec une exigence de résultats et impacts visibles pour tous.

Autant le marché a besoin d’acteurs, de règles de fonctionnement et d’accès, autant le métier agricole exige une bonne structuration, une professionnalisation et une logique d’intervention pour la simple raison que le marché est la seule destination naturelle des marchandises agricoles.

TRAORE B. François

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