Quand les paysans / éleveurs deviennent 
transformateurs et commerçants

Fin juin et début juillet, j'étais en Belgique puis en Allemagne, pour un plaidoyer en faveur de la reconnaissance de la souveraineté alimentaire.

Rappelons ce que nous entendons par souveraineté alimentaire :

"L’alimentation est un droit humain fondamental. Ce droit ne peut être concrétisé que dans un système qui garantit la souveraineté alimentaire. La souveraineté alimentaire est le droit de chaque nation d’élaborer sa propre capacité de produire ses aliments de base dans le respect de la diversité productive et culturelle. La souveraineté alimentaire désigne le DROIT des populations, de leurs Etats ou Unions à définir leur politique agricole et alimentaire, sans dumping vis-à-vis des pays tiers".

 

Le droit de souveraineté alimentaire est un droit des Etats qui doit être fondé sur un Accord multilatéral radicalement différent de l'Accord sur l'Agriculture de l'OMC, et qui serait placé sous l'égide de la FAO ou/et de la CNUCED. Il doit reposer sur le droit à une protection efficace à l'importation et sur l'interdiction de toutes les formes de dumping.
J'étais accompagné d'un membre de la Fédération des Eleveurs du Burkina. Nous avons profité de ce voyage pour visiter quelques fermes.
En Belgique, nous avons visité deux fermes qui faisaient un élevage biologique et qui non seulement transformaient leur lait en fromage, mais qui vendaient leur fromage dans un marché "bio" organisé par les producteurs eux-mêmes.

En Allemagne, nous avons rendu visite à un éleveur de bovins qui élevait ses bêtes pour commercialiser la viande. Cet éleveur nous disait qu'en Europe les normes de qualité sont telles (pour protéger les consommateurs) que cela entraîne des charges financières qui rendent difficile la concurrence avec la viande importée .
Pour résister à cette concurrence et mieux rentabiliser son élevage, l'exploitant de cette ferme possédait, sur place, une boucherie-charcuterie qui écoulait ainsi sa production.
Ainsi, les producteurs européens doivent se lancer dans la transformation et la commercialisation pour mieux s'en sortir.
Et cela, malgré la Politique Agricole Commune qui les protège.

Pas étonnant alors que les producteurs du Sud, qui ne bénéficient d'aucune protection, doivent faire de même.

C'est ce que commencent à faire les éleveurs autour des grandes villes : ils commercialisent eux-mêmes leur lait et le  transforment de plus en plus .
C'est aussi ce que commencent à faire les producteurs de riz. Par exemple, ceux de la plaine de Mogtedo se sont organisés en coopérative et vendent leur riz une fois étuvé.

Ceux du Sourou ont ouvert un magasin à Koudougou où ils vendent du riz décortiqué au Sourou, mais aussi du riz paddy. Ce riz paddy est acheté par quelques femmes qui l'étuve. C'est ce riz étuvé qui semble être le plus apprécié. Mais là, il subit de plein fouet la concurrence du riz importé, dit riz "parboiled", ce qui veut dire étuvé.

On trouve ce riz "parboiled" notamment  sous la marque "Super Warrior" 
(c'est à dire "Super Guerrier").

Est-il venu déclarer la guerre au riz burkinabè ?

Mais comment est-il arrivé ici ? Pourquoi avoir laissé pénétrer des troupes étrangères sur le sol national ?

Il est temps de rassembler les troupes pour le combat en faveur de la souveraineté alimentaire. Une alliance entre producteurs et consommateurs est urgente!

Koudougou, le 28 juillet 2004
Maurice Oudet

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