Afrique de l'Ouest :

la Société Civile s'organise

Partout, dans toute l'Afrique de l'Ouest, les populations des villes et des villages font le même constat : pour eux, la mondialisation néo-libérale, ça ne marche pas. Elle les rend de plus en plus pauvres, elle menace leurs faibles ressources. Alors, ces populations se lèvent pour crier : "ça suffit ! Trop, c'est trop !"

C'est ainsi qu'en novembre 2001, les producteurs de coton ont vu les cours de ce produit s'effondrés. Ils se sont concertés et ont lancé un appel solennel pour sauver le coton africain. Et ils ont poursuivi leurs efforts jusqu'à Cancún. Avec un certain succès.

Mais les producteurs de coton ne sont pas les seuls à s'organiser. C'est ainsi que, sur ce même site, nous avons publié la "Déclaration de la Coalition du Burkina Faso pour un Traitement Spécial et Différencié Renforcé sur la Conférence ministérielle de l'OMC à Cancún". Il est intéressant de noter que cette coalition est née à la suite d'une étude réalisée en 2002 par le Centre d'Etudes pour le Développement Africain (C.E.D.A.) et le Réseau Partenariat Hommes Femmes pour le Développement Africain (PARTEHFDA) sur la filière riz.

Cette étude a montré que "les états africains ont contracté d'importants crédits destinés aux aménagements rizicoles que les producteurs ont du mal à rentabiliser parce que les coûts des intrants sont élevés et qu'ils doivent faire face à la concurrence déloyale d'un riz importé subventionné par le pays exportateur, ou donné gratuitement dans le cadre d'un programme de développement devant être financé à partir de sa vente."

Comme toute amélioration notable de la situation pour ces femmes et ces hommes qui produisent du riz passe par une réforme de l'Accord sur l'Agriculture de l'OMC, les auteurs de cette analyse ont suscité cette Coalition pour un Traitement Spécial et Différencié Renforcé dans le cadre de cet accord.

Au Mali, c'est l'analyse de la dette du Mali et plus largement de la dette extérieure des pays du Tiers Monde qui a suscité la mise en place d'une coalition. Cette analyse a montré que cette dette pour une grande part peut-être qualifiée d'odieuse. Odieuse en sa source (contractée au nom d'une population qui n'a pas été consultée et qui n'a pas profité des sommes perçues); odieuse aussi parce qu'elle annule toute possibilité de développement. C'est ainsi qu'au Mali c'est constituée une Coalition pour l'Annulation de la Dette "Jubilé 2000".

Aujourd'hui les objectifs de Jubilé 2000 CAD/Mali se sont élargis. Cette coalition, qui participe à l'organisation de la Société Civile veut contribuer au changement des systèmes de politiques et des structures de développement qui maintiennent les pays du Tiers Monde dans la spirale de la dette et de la misère.

C'est cette coalition qui a été à l'origine du Forum des peuples de Siby.

Ce mois-ci (octobre 2003), elle a organisé une semaine de formation pour ses membres pendant laquelle les participants se sont intéressés aux négociations de l'OMC, comme à celles qui découlent des accords de Cotonou. Pour ce faire elle avait invité un représentant de la Coordination de la Société Civile ACP/UE du Niger. Une façon pour elle de bénéficier de l'expérience des autres, mais aussi de développer des contacts pour avancer vers une coalition à l'échelle de la CEDEAO ou de l'UEMOA. Déjà des convergences apparaissent : notamment la volonté de faire passer le bien des populations, leur épanouissement et leur développement avant le développement du commerce. Toutes les analyses ont montré que cela passe par une protection de l'agriculture et de l'alimentation. Toutes les propositions de ces coalitions vont donc vers un renforcement de la souveraineté alimentaire grâce à une protection accrue de l'agriculture. Elles souhaitent épauler leurs gouvernements dans leurs négociations à l'OMC, mais aussi dans celles qui ont pour cadre les Accords de Cotonou.

Cela veut dire : pas de nouvel accord à l'OMC sans reconnaissance du droit pour nos pays de protéger leur agriculture (spécialement par des taxes à l'importation).

Cette même revendication doit être portée aux négociations qui viennent de s'ouvrir entre l'Union Européenne et les pays ACP pour la mise en place d'APER (Accords de Partenariats Economiques Régionaux). Il s'agit d'accord prévu dans le cadre de l'Accord de Cotonou. Nous y reviendrons.


Maurice Oudet
Bamako, le lundi 27 octobre 2003

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