Qui défend les intérêts des paysans des pays pauvres à l'O.M.C. ?

Certainement pas le Directeur Général de l'O.M.C., M. Supachai Panitchpakdi, quand il affirme dans son discours d'orientation au World Food and Farming Congress, à Londres, le 25 novembre 2002 :

"la libéralisation du commerce dans l'agriculture est probablement la contribution la plus importante que le système commercial multilatéral peut apporter pour aider les pays en développement, y compris les plus pauvres d'entre eux, à sortir de la pauvreté".

( http://www.wto.org/french/news_f/spsp_f/spsp06_f.htm (uniquement en anglais))

Comment, aujourd'hui, peut-on encore oser proclamer une telle contre-vérité ?

Si cet homme est sincère, s'il croit vraiment que ce qu'il dit est la vérité, on peut en déduire que malgré la lourde responsabilité qu'il a accepté, et les négociations sur l'agriculture qui ont commencé à l'O.M.C., il n'a jamais été à la rencontre des paysans des pays pauvres. S'il est sincère, on peut deviner que cet homme n'est pas capable de sortir de l'idéologie du libéralisme sans frontière. Pourtant, si on peut comprendre qu'il n'écoute pas le message d'universitaires français comme Mazoyer ou Berthelot, il est difficile d'imaginer qu'il n'a pas lu le livre du prix Nobel d'économie, le professeur Joseph Stiglitz : "La grande désillusion" (Titre original : Globalization and Its Discontents). Ce professeur, qui en 1999 a démissionné de son poste d'économiste en chef et de vice-président de la Banque Mondiale, écrit dans ce livre : "Aujourd'hui, la mondialisation, ça ne marche pas. Ça ne marche pas pour les pauvres. Ça ne marche pas pour l'environnement. Ça ne marche pas pour la stabilité mondiale."

Il est donc plus probable que cet homme sait très bien que ce qu'il dit est faux. Alors nous devons en conclure qu'à l'O.M.C. les pays pauvres, et spécialement les paysans de ces pays pauvres auront du mal à se faire entendre. Il est à craindre que si tous les pays membres de l'O.M.C. sont égaux (chacun une voix !), certains sont plus égaux que d'autres !

Comment peut-on penser qu'il suffit de mettre en concurence les paysans des pays développés (qui produisent en une journée l'équivalent de 500 paysans du Sahel) pour que par miracle tout s'arrange ? A la fin de sa conférence, le Directeur Général de l'O.M.C. concluait : "Le démantélement des entraves au commerce... aideront à amplifier la production dans les pays où la nourriture peut être produite le plus efficacement possible !"

Et si la souveraineté alimentaire, M. Supachai Panitchpakdi, était un droit pour chaque état : 
le droit de se nourrir soit même, le droit de ne pas dépendre du bon vouloir d'un pouvoir étranger pour sa survie !

Comme par hasard (!) nous retrouvons la pensée des experts de la F.A.O. :

"Si les prix réels des aliments n'augmentent pas, ... la plupart des pays pourront se permettre d'importer des céréales pour satisfaire leurs besoins." et les pays exportateurs de céréales traditionnels, comme les Etats-unis, l'UE, le Canada, l'Australie et l'Argentine, seront trop heureux de leur vendre ces céréales et tous les produits de leurs usines agroalimentaires.

Et pour arriver à leur fin, ces pays ont un allier de taille en la personne de M. Supachai Panitchpakdi. Dans sa conférence il explique que l'ordre du jour des négociations en cours à l'O.M.C., à la suite de la rencontre de Doha, "est la négociation commerciale la plus ambitieuse et la plus étendue jamais entreprise."

A l'O.M.C. tous les pays sont égaux ! Seulement les USA pourront mobiliser 1 000 experts, contre un pour le Burkina ! Comment alors être présent sur tous les fronts : agriculture et produits agroalimentaires, service (éducation, santé, télécommunication...), produits industriels, environnement, la dette, le tranfert de technologie...

Or les négociations doivent être achevées pour janvier 2005. M. Supachai Panitchpakdi n'hésite pas à parler de "calendrier impitoyable". Oui en effet, pas de pitié pour les plus faibles. Le libéralisme proposé par M. Supachai Panitchpakdi ressemble fort à la liberté du renard dans le poulailler !

P-S : Vous pouvez consulter également : Quelle stratégie pour lutter contre la pauvreté ? de Maurice Oudet.

Koudougou le 30/11/2002

Journée mondiale contre la peine de mort.

Refuser de protéger l'agriculture des pays pauvres, 
c'est condammner à la misère 800 millions de  paysans pauvres à travers le monde, 
et parmi eux un bon nombre à la mort (maladies, suicides...

FaLang translation system by Faboba